La fiscalité applicable aux Plans d’Épargne Retraite (PER) représente un enjeu majeur pour les épargnants souhaitant optimiser leur préparation financière à la retraite. Parmi les aspects fiscaux méritant une attention particulière figure le traitement des bonus d’entrée, ces avantages commerciaux octroyés par les établissements financiers pour attirer de nouveaux souscripteurs. Ces sommes, versées sous forme de primes ou d’abondements lors de l’ouverture d’un PER ou d’un transfert, soulèvent de nombreuses interrogations quant à leur qualification fiscale. Entre avantages en nature, produits financiers ou compléments de versement, la nature juridique et fiscale de ces bonus reste souvent mal comprise. Cet examen approfondi du cadre légal et des pratiques administratives vise à clarifier le traitement fiscal applicable à ces sommes, tant à l’entrée qu’à la sortie du plan, pour permettre aux contribuables d’intégrer judicieusement ces paramètres dans leur stratégie d’épargne retraite.
Cadre juridique et qualification fiscale des bonus d’entrée
Le Plan d’Épargne Retraite (PER) s’inscrit dans le cadre de la loi PACTE (Plan d’Action pour la Croissance et la Transformation des Entreprises) promulguée en mai 2019. Ce dispositif d’épargne retraite a été conçu pour simplifier et harmoniser les produits préexistants tout en renforçant leur attractivité fiscale. Dans ce contexte concurrentiel, les établissements financiers ont développé diverses stratégies commerciales, dont l’attribution de bonus d’entrée.
La qualification fiscale de ces bonus constitue un point fondamental pour déterminer leur traitement. Selon la doctrine administrative, notamment précisée dans le Bulletin Officiel des Finances Publiques (BOFiP), ces sommes peuvent recevoir différentes qualifications en fonction de leurs caractéristiques.
Nature juridique des bonus d’entrée
Les bonus d’entrée peuvent prendre plusieurs formes juridiques, influençant directement leur traitement fiscal :
- Les versements complémentaires effectués par l’établissement gestionnaire sur le PER du souscripteur
- Les primes commerciales versées directement au souscripteur, indépendamment du PER
- Les avantages en nature ou cadeaux offerts lors de la souscription
La Cour de cassation a eu l’occasion de se prononcer sur la nature de ces avantages dans plusieurs arrêts, notamment dans un arrêt du 19 janvier 2017 (n°15-24.292) concernant les primes versées dans le cadre d’assurance-vie. Par analogie, ces principes peuvent s’appliquer aux bonus d’entrée des PER. Selon cette jurisprudence, ces sommes constituent des libéralités consenties par l’établissement financier et non des produits financiers générés par le contrat lui-même.
Cette distinction s’avère déterminante car elle conditionne l’application ou non des régimes fiscaux spécifiques propres aux produits d’épargne retraite. Le Conseil d’État, dans sa décision n°356328 du 28 octobre 2013, a confirmé cette approche en considérant que les primes commerciales versées en dehors du contrat ne suivent pas le régime fiscal de ce dernier.
Position de l’administration fiscale
L’administration fiscale a précisé sa doctrine à travers plusieurs rescrits et instructions. Le rescrit n°2010/14 (FP) du 6 avril 2010, bien qu’antérieur à la création du PER, pose des principes transposables. Selon cette position, confirmée par l’instruction BOI-RSA-PENS-10-10-30 mise à jour le 20 décembre 2019, les bonus versés directement sur le plan sont assimilés à des versements volontaires du titulaire.
Cette qualification entraîne deux conséquences majeures :
- Ces sommes sont potentiellement déductibles du revenu imposable du titulaire (dans les limites légales)
- Elles seront soumises à la fiscalité applicable aux versements volontaires lors du dénouement du contrat
En revanche, les primes versées hors du plan relèvent du régime des revenus de capitaux mobiliers (RCM) et sont imposables l’année de leur perception, sans bénéficier du régime fiscal favorable du PER.
Traitement fiscal à l’entrée : déductibilité et plafonnement
Le traitement fiscal des bonus d’entrée à l’entrée du PER soulève des questions complexes, notamment en matière de déductibilité fiscale. La loi PACTE a instauré un régime fiscal avantageux pour les versements volontaires sur un PER, permettant leur déduction du revenu global du contribuable ou du revenu professionnel pour les travailleurs indépendants.
Lorsque le bonus d’entrée est versé directement sur le PER par l’établissement gestionnaire, la question de sa déductibilité fiscale se pose. Selon l’analyse de la Direction Générale des Finances Publiques (DGFiP), ces sommes sont assimilées à des versements volontaires du titulaire et peuvent donc, en principe, bénéficier de la déductibilité fiscale.
Conditions de déductibilité des bonus versés sur le PER
Pour être déductibles, les bonus d’entrée doivent répondre à plusieurs critères cumulatifs :
- Être effectivement versés sur le compartiment des versements volontaires du PER
- S’inscrire dans les plafonds de déductibilité applicables
- Faire l’objet d’une mention explicite sur les documents contractuels
La doctrine administrative précise que ces sommes sont considérées comme des versements effectués par le titulaire lui-même, bien qu’elles proviennent en réalité de l’établissement financier. Cette fiction juridique permet leur assimilation aux versements volontaires classiques.
Une réponse ministérielle publiée au Journal Officiel du 12 mars 2021 (question écrite n°35782) a confirmé cette position en indiquant que « les abondements commerciaux versés directement par l’établissement gestionnaire sur le PER du titulaire suivent le même régime fiscal que les versements volontaires effectués par ce dernier ».
Plafonnement de la déductibilité
La déductibilité fiscale des versements sur un PER, y compris les bonus d’entrée, est soumise à un double plafonnement :
Pour les salariés, le plafond annuel est égal à 10% des revenus professionnels de l’année précédente, limités à huit fois le plafond annuel de la sécurité sociale (PASS), ou à 10% du PASS si ce montant est plus élevé. Pour 2023, avec un PASS fixé à 43 992 euros, ce plafond s’établit donc à 35 193,60 euros ou 4 399,20 euros selon la situation du contribuable.
Pour les travailleurs non-salariés (TNS), le plafond est plus avantageux et correspond à 10% du bénéfice imposable limité à huit fois le PASS, augmenté de 15% sur la fraction de bénéfice comprise entre un et huit PASS. Pour 2023, ce plafond peut atteindre 78 508 euros pour un TNS dont le bénéfice est supérieur à huit fois le PASS.
Le bonus d’entrée vient s’imputer sur ces plafonds de déductibilité et peut donc, dans certains cas, limiter la capacité du titulaire à effectuer d’autres versements déductibles au cours de la même année. Cette particularité doit être prise en compte dans la stratégie d’optimisation fiscale du contribuable, particulièrement pour les bonus significatifs.
Traitement dans la déclaration de revenus
Sur le plan pratique, le contribuable doit inclure le montant du bonus d’entrée versé sur son PER dans le total des versements déductibles déclarés dans sa déclaration annuelle de revenus (formulaire 2042 RICI, case 6NS à 6PT selon la situation).
L’établissement gestionnaire du PER a l’obligation de fournir au titulaire une attestation fiscale mentionnant le montant total des versements effectués sur le plan, incluant les bonus d’entrée versés directement sur le PER. Cette attestation constitue le justificatif à conserver en cas de contrôle fiscal.
Fiscalité des bonus versés hors du PER
Contrairement aux bonus versés directement sur le Plan d’Épargne Retraite, ceux versés hors du plan obéissent à un régime fiscal distinct et généralement moins avantageux. Ces primes commerciales, remises en espèces ou avantages en nature constituent des libéralités octroyées par l’établissement financier au souscripteur, indépendamment du fonctionnement du PER lui-même.
La qualification fiscale de ces sommes a fait l’objet de précisions administratives et jurisprudentielles qui permettent aujourd’hui d’établir un cadre relativement clair.
Imposition au titre des revenus de capitaux mobiliers
Les bonus versés hors du PER sont généralement qualifiés de revenus de capitaux mobiliers (RCM) par l’administration fiscale. Cette position est notamment exprimée dans la doctrine administrative BOI-RPPM-RCM-10-10-10 qui précise que « les primes ou cadeaux attribués à l’occasion de la souscription ou de la conclusion d’un contrat d’assurance ou de capitalisation constituent un revenu de capitaux mobiliers ».
Par extension, ce principe s’applique aux bonus versés lors de la souscription d’un PER. Ces sommes sont donc soumises au prélèvement forfaitaire unique (PFU) de 30%, comprenant :
- 12,8% au titre de l’impôt sur le revenu
- 17,2% au titre des prélèvements sociaux
Le contribuable conserve toutefois la possibilité d’opter pour l’imposition selon le barème progressif de l’impôt sur le revenu, option qui doit être exercée globalement pour l’ensemble des revenus soumis au PFU.
À la différence des bonus versés sur le PER, ces sommes sont imposables dès leur perception, sans possibilité de bénéficier du report d’imposition propre aux produits d’épargne retraite. Elles doivent être déclarées par le contribuable dans sa déclaration annuelle de revenus.
Traitement des avantages en nature
Certains établissements financiers proposent des avantages en nature (tablettes numériques, montres connectées, etc.) en lieu et place de primes en espèces. Ces cadeaux n’échappent pas à l’imposition et suivent le même régime que les primes en numéraire.
La valeur fiscale retenue correspond à la valeur vénale du bien offert sur le marché. L’administration fiscale a précisé, dans une réponse ministérielle publiée au Journal Officiel du 7 avril 2015 (question écrite n°73995), que « les cadeaux commerciaux constituent un avantage en argent imposable entre les mains du bénéficiaire selon les règles de droit commun ».
Un arrêt de la Cour de cassation du 3 juillet 2019 (n°18-16.587) a confirmé cette approche en jugeant que les cadeaux remis à l’occasion de la souscription d’un contrat financier constituent bien des revenus imposables.
Obligations déclaratives pour les établissements
Les établissements financiers qui versent des bonus en dehors du PER ont l’obligation de déclarer ces sommes à l’administration fiscale via la déclaration IFU (Imprimé Fiscal Unique, formulaire n°2561).
Cette obligation déclarative s’applique quelle que soit la forme du bonus (numéraire ou nature) et quel que soit son montant. Les établissements doivent également en informer les bénéficiaires en leur adressant un relevé récapitulatif des sommes versées.
Le non-respect de cette obligation déclarative expose l’établissement à des sanctions fiscales, notamment une amende égale à 50% des sommes non déclarées, conformément à l’article 1736 du Code général des impôts.
Pour le contribuable, l’omission de déclarer ces revenus peut être qualifiée de manquement délibéré et entraîner une majoration des droits de 40%, voire être considérée comme un abus de droit dans certains cas particuliers.
Impact des bonus sur la fiscalité à la sortie du PER
L’un des aspects les plus complexes du traitement fiscal des bonus d’entrée concerne leur impact sur la fiscalité applicable lors du dénouement du PER. Le régime fiscal à la sortie varie considérablement selon la forme de sortie choisie (capital ou rente) et la nature des sommes versées initialement.
Les bonus d’entrée versés directement sur le PER vont influencer la fiscalité future du plan, particulièrement lorsqu’ils ont été intégrés au compartiment des versements volontaires et ont bénéficié de la déductibilité fiscale.
Sort fiscal des bonus en cas de sortie en capital
Lorsque le titulaire du PER opte pour une sortie en capital, le traitement fiscal des sommes issues des bonus d’entrée suit celui applicable aux versements volontaires ayant bénéficié de la déduction fiscale :
- Le capital constitué (correspondant aux versements initiaux, dont les bonus) est soumis au barème progressif de l’impôt sur le revenu, sans application de l’abattement de 10% pour frais professionnels
- Les produits (plus-values et intérêts générés) sont soumis au prélèvement forfaitaire unique (PFU) de 30%, ou sur option au barème progressif de l’impôt sur le revenu
Pour illustrer cette situation, prenons l’exemple d’un contribuable ayant bénéficié d’un bonus d’entrée de 1 000 € versé directement sur son PER. Ce bonus, assimilé à un versement volontaire, a été déduit de son revenu imposable. Après 15 ans, ce montant, avec les intérêts générés, représente 1 800 € (1 000 € de capital et 800 € de produits). En cas de sortie en capital, les 1 000 € seront soumis au barème progressif de l’IR, tandis que les 800 € de produits seront soumis au PFU de 30%.
La loi de finances pour 2023 n’a pas modifié ce régime, confirmant ainsi la stabilité du cadre fiscal applicable aux sorties en capital des PER.
Traitement des bonus en cas de sortie en rente
En cas d’option pour une sortie en rente viagère, les bonus d’entrée ayant été versés sur le PER et ayant bénéficié de la déduction fiscale sont intégrés dans l’assiette servant au calcul de la rente. Cette rente sera alors imposée selon le régime des pensions de retraite :
- Imposition au barème progressif de l’impôt sur le revenu
- Application de l’abattement de 10% pour frais professionnels (plafonné à 4 123 € pour les revenus de 2023)
- Soumission aux prélèvements sociaux au taux de 9,1% (taux réduit pour les personnes à faible revenu)
La jurisprudence du Conseil d’État, notamment dans l’arrêt n°344950 du 3 juillet 2013, a confirmé que l’ensemble des sommes ayant contribué à la constitution de la rente, y compris les abondements et bonus, suivent le même régime fiscal lors de la perception de la rente.
Cas particulier des bonus liés aux transferts
Les bonus d’entrée octroyés dans le cadre d’un transfert d’un contrat d’épargne retraite préexistant (PERP, Madelin, etc.) vers un PER présentent des particularités fiscales. En effet, ces transferts sont en principe neutralisés fiscalement, conformément à l’article L224-40 du Code monétaire et financier.
Lorsqu’un établissement verse un bonus à l’occasion d’un tel transfert, deux situations peuvent se présenter :
Si le bonus est versé directement sur le nouveau PER, il sera traité comme un versement volontaire distinct de la somme transférée. Il pourra donc bénéficier de la déduction fiscale (dans les limites applicables) et sera soumis à la fiscalité correspondante lors du dénouement.
Si le bonus est versé hors du plan, il sera imposable immédiatement comme un revenu de capitaux mobiliers, sans affecter la neutralité fiscale du transfert lui-même.
Une réponse ministérielle publiée au Journal Officiel du 5 octobre 2021 (question écrite n°38945) a précisé que « les avantages commerciaux octroyés à l’occasion d’un transfert n’affectent pas le traitement fiscal du transfert lui-même, qui demeure fiscalement neutre ».
Stratégies d’optimisation et points de vigilance
Face à la complexité du traitement fiscal des bonus d’entrée sur les PER, des stratégies d’optimisation peuvent être envisagées par les épargnants soucieux de maximiser l’avantage fiscal tout en préservant leur flexibilité financière. Ces approches doivent toutefois s’accompagner d’une vigilance particulière sur certains points susceptibles de générer des redressements fiscaux.
Arbitrage entre bonus sur PER et bonus hors PER
Lorsqu’un établissement financier propose le choix entre un bonus versé directement sur le PER et une prime commerciale versée hors du plan, l’arbitrage doit prendre en compte plusieurs facteurs :
- La tranche marginale d’imposition du contribuable : plus celle-ci est élevée, plus l’intérêt de privilégier un bonus sur le PER sera grand
- L’horizon de placement : un bonus versé sur le PER implique un blocage des fonds jusqu’à la retraite (hors cas de déblocage anticipé)
- La disponibilité du plafond de déductibilité : si le contribuable a déjà saturé son plafond par d’autres versements, un bonus hors PER peut être préférable
Pour un contribuable dont la TMI est de 41%, un bonus de 1 000 € versé sur le PER génère une économie fiscale immédiate de 410 €, mais les sommes seront bloquées et imposées à la sortie. Le même bonus versé hors du PER sera immédiatement imposé à 30% (PFU), soit une charge fiscale de 300 €, mais les fonds resteront disponibles.
La jurisprudence du Conseil d’État, notamment dans sa décision n°423044 du 12 février 2020, rappelle que le choix du contribuable entre différentes options fiscalement distinctes relève de sa liberté de gestion et ne peut être remis en cause sur le fondement de l’abus de droit, dès lors que ce choix n’est pas artificiel.
Fractionnement des versements et des bonus
Une stratégie d’optimisation peut consister à fractionner les versements et les bonus sur plusieurs années fiscales pour :
- Éviter de saturer le plafond de déductibilité annuel
- Lisser l’impact fiscal des sorties futures en capital
- Maintenir une capacité de déduction pour d’autres versements
Cette approche peut être particulièrement pertinente pour les contribuables dont les revenus fluctuent significativement d’une année à l’autre. En négociant avec l’établissement financier un versement échelonné du bonus d’entrée, il devient possible d’optimiser l’avantage fiscal sur plusieurs exercices.
La Cour administrative d’appel de Bordeaux, dans un arrêt du 17 décembre 2019 (n°17BX03828), a validé le principe du fractionnement volontaire des versements sur des produits d’épargne retraite, confirmant ainsi qu’il s’agit d’une pratique fiscalement acceptable.
Risques de requalification et contentieux potentiels
Plusieurs points de vigilance doivent être considérés pour éviter les risques de requalification fiscale :
Le risque d’abus de droit : l’administration fiscale pourrait invoquer l’abus de droit fiscal (article L64 du Livre des procédures fiscales) si elle estime que l’opération a un caractère fictif ou qu’elle n’est motivée que par la volonté d’éluder l’impôt. Ce risque existe notamment lorsque le bonus est artificiellement présenté comme versé sur le PER alors qu’il s’agit en réalité d’un versement hors plan déguisé.
La remise en cause de la déductibilité : l’administration pourrait contester la déductibilité du bonus si les conditions formelles ne sont pas respectées, notamment si l’attestation fiscale n’est pas conforme ou si le bonus n’est pas clairement identifié dans la documentation contractuelle.
Le contentieux sur la valeur des avantages en nature : la valorisation des cadeaux ou avantages en nature peut faire l’objet de contestations, l’administration pouvant estimer que la valeur déclarée est sous-évaluée.
Pour se prémunir contre ces risques, il est recommandé de :
- Conserver l’ensemble de la documentation contractuelle mentionnant explicitement les conditions du bonus
- S’assurer que les attestations fiscales sont complètes et détaillent précisément la nature des sommes versées
- Vérifier que l’établissement financier a correctement déclaré les bonus versés hors PER à l’administration
Un arrêt de la Cour de cassation du 5 mars 2020 (n°18-24.850) a rappelé l’importance de la preuve documentaire dans les contentieux fiscaux liés aux produits financiers, soulignant la nécessité pour le contribuable de conserver tous les justificatifs relatifs aux versements effectués.
Perspectives d’évolution et harmonisation européenne
Le cadre fiscal applicable aux bonus d’entrée des PER s’inscrit dans un environnement juridique en constante évolution, tant au niveau national qu’européen. Les récentes initiatives visant à promouvoir la mobilité des produits d’épargne retraite au sein de l’Union européenne pourraient modifier substantiellement le traitement fiscal de ces avantages commerciaux.
La compréhension des tendances actuelles et des projets de réforme permet d’anticiper les évolutions futures et d’adapter sa stratégie d’épargne retraite en conséquence.
Évolutions législatives récentes et annoncées
Plusieurs évolutions législatives récentes ou en préparation sont susceptibles d’impacter le traitement fiscal des bonus d’entrée des PER :
La loi de finances pour 2023 a maintenu la stabilité du régime fiscal des PER, confirmant ainsi la volonté du législateur de pérenniser ce dispositif d’épargne retraite. Aucune modification significative n’a été apportée au traitement fiscal des bonus d’entrée.
Le projet de loi ASAP 2 (Accélération et Simplification de l’Action Publique), en cours d’élaboration, pourrait contenir des mesures de simplification administrative concernant les obligations déclaratives liées aux produits d’épargne retraite.
La transposition de la directive européenne sur les produits paneuropéens d’épargne-retraite individuelle (PEPP) pourrait entraîner une harmonisation partielle des règles fiscales applicables aux avantages commerciaux liés à ces produits.
Ces évolutions s’inscrivent dans une tendance de fond visant à renforcer l’attractivité des dispositifs d’épargne retraite tout en maintenant un cadre fiscal équilibré. Une réponse ministérielle publiée au Journal Officiel du 15 juin 2022 (question écrite n°41256) a confirmé que « le gouvernement n’envisage pas de modification substantielle du régime fiscal des PER dans un avenir proche, afin de garantir la stabilité nécessaire à la confiance des épargnants ».
Impact du règlement PEPP sur les bonus d’entrée
Le règlement européen 2019/1238 relatif au produit paneuropéen d’épargne-retraite individuelle (PEPP), entré en application le 22 mars 2022, vise à créer un cadre harmonisé pour les produits d’épargne retraite au niveau européen.
Ce règlement, bien que ne traitant pas directement de la fiscalité qui reste une prérogative nationale, pourrait influencer indirectement le traitement des bonus d’entrée :
- Les exigences de transparence renforcées imposées aux fournisseurs de PEPP pourraient conduire à une meilleure information des souscripteurs sur la nature et le traitement fiscal des bonus
- La portabilité des PEPP entre États membres pourrait complexifier le traitement fiscal des bonus en cas de transfert transfrontalier
- Les recommandations de la Commission européenne encouragent les États membres à accorder aux PEPP le même traitement fiscal que celui applicable aux produits nationaux similaires
Une communication de la Commission européenne du 29 avril 2021 (COM(2021) 214 final) a souligné l’importance d’une approche coordonnée des États membres en matière fiscale pour garantir le succès des PEPP, suggérant une possible convergence future des régimes fiscaux applicables aux produits d’épargne retraite, y compris pour les avantages commerciaux qui y sont associés.
Tendances jurisprudentielles et doctrine administrative
L’analyse des tendances jurisprudentielles récentes permet d’identifier plusieurs orientations susceptibles d’influencer le traitement fiscal futur des bonus d’entrée :
La jurisprudence de la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE) tend à favoriser la neutralité fiscale des opérations transfrontalières concernant l’épargne retraite. Dans l’arrêt C-269/09 du 6 juillet 2011 (Commission contre Espagne), la CJUE a jugé contraires au droit de l’Union les dispositions fiscales nationales défavorisant les transferts transfrontaliers de produits d’épargne retraite.
Au niveau national, le Conseil d’État maintient une approche stricte quant à la qualification fiscale des avantages commerciaux, comme l’illustre sa décision n°435730 du 12 octobre 2020 qui confirme le principe selon lequel la qualification fiscale doit s’apprécier au regard de la nature juridique réelle de l’opération, indépendamment de sa présentation formelle.
La doctrine administrative évolue vers une plus grande précision dans la définition des critères permettant de distinguer les différents types de bonus et leur traitement fiscal. Le BOFiP a ainsi été mis à jour le 3 mars 2022 pour intégrer des exemples concrets facilitant l’application des règles fiscales aux avantages commerciaux liés aux produits financiers.
Ces tendances suggèrent une consolidation progressive du cadre juridique applicable aux bonus d’entrée, avec un double mouvement d’harmonisation européenne et de précision technique au niveau national.
La vigilance reste néanmoins de mise pour les contribuables et les professionnels du secteur, car ces évolutions pourraient modifier substantiellement les stratégies d’optimisation fiscale actuellement mises en œuvre autour des bonus d’entrée des PER.
