La loi Lagleize, du nom du député Jean-Luc Lagleize, est une proposition de loi visant à moderniser et réformer le secteur immobilier français. Elle a pour objectif principal de faciliter l’accès à la propriété et de lutter contre la spéculation immobilière. Dans cet article, nous vous proposons une analyse détaillée de cette loi, ses ambitions, son contenu et ses implications pour les acteurs du marché immobilier.
Le contexte et les enjeux
Le marché immobilier français connaît depuis plusieurs années une hausse constante des prix, notamment dans les grandes agglomérations. Cette situation rend difficile l’accès à la propriété pour de nombreux ménages, en particulier les jeunes et les familles modestes. Par ailleurs, la spéculation immobilière contribue à accentuer ces tensions sur le marché en provoquant une hausse artificielle des prix.
Dans ce contexte, le député Jean-Luc Lagleize a été missionné par le Premier ministre Édouard Philippe en septembre 2018 afin d’élaborer des propositions pour réformer le secteur immobilier. Le rapport qu’il a remis en novembre 2019 préconise notamment la création d’un nouveau modèle de dissociation entre le foncier et le bâti, ainsi que la mise en place d’un mécanisme d’encadrement des prix du foncier.
La dissociation entre le foncier et le bâti
La mesure phare de la loi Lagleize concerne la dissociation entre le foncier, c’est-à-dire le terrain sur lequel est construit un bien immobilier, et le bâti, c’est-à-dire la construction elle-même. Cette dissociation permettrait aux ménages d’acquérir uniquement le bâti et de bénéficier d’un droit de jouissance du terrain pour une durée déterminée.
Ce mécanisme s’inspire du modèle anglo-saxon du leasehold, très répandu au Royaume-Uni et dans les pays du Commonwealth. Il existe déjà en France sous la forme des baux emphytéotiques administratifs (BEA), mais il est peu utilisé en raison de sa complexité juridique.
La loi Lagleize prévoit ainsi de créer un nouveau dispositif, appelé Organisme de Foncier Solidaire (OFS), qui serait chargé de gérer les terrains concernés par cette dissociation. Les ménages pourraient alors acquérir leur logement en ne payant que la valeur du bâti, tout en bénéficiant d’un droit d’usage du terrain accordé par l’OFS. Ce droit serait renouvelable et transmissible à leurs héritiers.
L’encadrement des prix du foncier
Pour lutter contre la spéculation immobilière et maîtriser l’inflation des prix du foncier, la loi Lagleize propose également un mécanisme d’encadrement des prix. Ce dispositif reposerait sur la mise en place de barèmes de référence par les collectivités locales, qui fixeraient le prix maximum auquel un terrain peut être vendu en fonction de sa localisation et de ses caractéristiques.
Les collectivités pourraient ainsi moduler ces barèmes en fonction de leurs objectifs en matière d’urbanisme et d’aménagement du territoire. Par exemple, elles pourraient décider de baisser les prix dans les zones où elles souhaitent encourager la construction de logements sociaux ou l’installation de commerces.
Ce mécanisme d’encadrement des prix pourrait également être assorti d’un système de bonus-malus, incitant les propriétaires à vendre leurs terrains rapidement afin d’éviter une pénalité financière. Cette mesure vise à limiter la rétention foncière et à favoriser la mise sur le marché des terrains disponibles.
Les implications pour les acteurs du marché immobilier
La mise en œuvre de la loi Lagleize aurait des conséquences importantes pour l’ensemble des acteurs du marché immobilier, notamment les promoteurs immobiliers, les constructeurs et les notaires.
En premier lieu, cette réforme impliquerait une modification profonde des pratiques professionnelles et des contrats immobiliers. Les professionnels devront s’adapter à ce nouveau modèle de dissociation entre le foncier et le bâti, ainsi qu’aux mécanismes d’encadrement des prix. Ils devront également travailler en étroite collaboration avec les OFS et les collectivités locales pour mettre en œuvre ces dispositifs.
Par ailleurs, la loi Lagleize pourrait conduire à une baisse des prix de l’immobilier, en particulier dans les zones où la spéculation est la plus forte. Cette baisse des prix serait bénéfique pour les ménages souhaitant accéder à la propriété, mais elle pourrait aussi entraîner une diminution des marges pour les acteurs du marché immobilier.
Enfin, cette réforme représente un enjeu majeur pour les collectivités locales, qui devront assumer un rôle central dans la mise en œuvre de ces mesures. Elles devront notamment élaborer et mettre à jour régulièrement les barèmes de référence pour l’encadrement des prix du foncier, ainsi que gérer et contrôler les OFS.
Un débat parlementaire attendu
La loi Lagleize est actuellement en cours d’examen par le Parlement français. Les débats s’annoncent animés, tant les enjeux sont importants et les positions divergentes. Certains acteurs du marché immobilier expriment des réserves quant à l’efficacité des mesures proposées et leur impact sur leur activité. De leur côté, les défenseurs de cette réforme estiment qu’elle constitue une réponse adaptée aux défis que rencontre le secteur immobilier français aujourd’hui.
Quoi qu’il en soit, il est indéniable que la loi Lagleize ouvre un débat essentiel sur l’avenir du marché immobilier en France et sur les moyens de faciliter l’accès à la propriété pour tous. Les prochains mois seront déterminants pour connaître l’issue de ces discussions et l’éventuelle adoption de cette réforme ambitieuse.